INFO
2003
-
«
L'espèce
humaine
est
menacée
»
L'astrophysicien
Hubert
Reeves
a
mal
à
sa
Terre.
Son
livre
dresse
un
état
des
lieux
sans
concessions
de
la
planète
et
de
l'inaction
humaine.
«Sauf
sursaut
majeur,
notre
espèce
risque
de
disparaître»,
clame
ce
prof
qui
nous
avait
habitués
à
rêver.
Après
nous
avoir
fait
rêver
des
étoiles,
vous
nous
ramenez
à
une
difficile
réalité
terrestre
(1).
L'heure
n'est-elle
plus
à
s'enivrer
?
Il
y
a
la
belle
histoire
!
Celle
que
je
décrivais
dans
mes
livres
précédents:
l'évolution
de
l'univers,
la
croissance
de
la
complexité,
l'apparition
de
la
vie...
Cette
vision
du
passé
et
de
nos
origines
nécessitent
ce
regard
vers
le
ciel.
Mais
on
ne
peut
pas
s'empêcher,
en
même
temps,
de
regarder
vers
l'avenir.
Non
pas
de
l'avenir
de
l'univers,
parce
qu'il
va
bien,
pas
de
l'avenir
de
la
Terre,
parce
qu'elle
va
continuer
à
tourner
autour
du
soleil
et
même
pas
de
l'avenir
de
la
vie,
dont
il
est
question,
parce
que
la
vie
sur
Terre
en
a
connu
d'autres
!
Il
y
a
eu
des
moments
ou
la
température
et
la
quantité
de
gaz
carbonique
ont
été
plus
élevés.
La
vie
s'est
adaptée
à
des
changements
climatiques
extraordinaires
depuis
quatre
milliards
d'années.
Mais
ce
qui
est
menacé,
c'est
l'espèce
humaine
et
les
grands
vertébrés.
Les
conséquences
du
réchauffement
demeurent
encore
en
partie
ignorées
par
le
public.
Comment
faire
comprendre
que
ce
qui
passe
est
important
?
Notre
espèce
est
très
menaçante
pour
les
diverses
formes
de
vie.
Ce
qui
est
très
clair,
c'est
que
la
faune
et
la
flore
en
général
seront
très
différentes,
dans
l'avenir,
de
ce
qu'elles
étaient
jusqu'en
1900.
On
le
voit
déjà
avec
le
rythme
effarant
d'extinctions
que
nous
avons
pour
le
moment.
Il
y
a
225
millions
d'années,
80
%
des
espèces
ont
disparu;
il
65
millions
d'années,
50
%
des
espèces
ont
disparu:
c'était
alors
des
phénomènes
naturels.
La
différence,
c'est
que
si
passe
aujourd'hui
est
provoqué
par
l'activité
humaine
et
se
passe
à
une
vitesse
inégalée
dans
l'évolution.
Mais
ce
n'est
pas
un
phénomène
incontournable.
Un
homme
atteint
d'un
cancer
peut
refuser
de
se
faire
soigner.
Notre
malade,
c'est
la
Terre.
Et
si
on
ne
la
soigne
pas...
Vous
évoquez
à
ce
sujet
une
hausse
possible
de
la
température
de
quelques
dizaines
de
degrés.
C'est
un
scénario
peu
abordé
par
les
experts.
Agitez-vous
un
épouvantail
?
Ce
scénario
pourrait
se
produire.
La
météo
et
le
climat
sont
des
sciences
difficiles.
Ce
que
le
groupement
intergouvernemental
d'experts
sur
le
réchauffement
climatique
(Giec)
fait,
c'est
de
prévoir
ce
qu'il
va
se
passer
jusqu'à
2100.
Soit,
une
hausse
de
deux
à
maximum
cinq
degrés
de
la
température.
Mais
cela
ne
dit
rien
de
ce
que
va
se
passer
après
ni
quand
cela
va
s'arrêter.
Il
y
a
des
possibilités
que
cela
continue
encore
longtemps.
Nous
ne
sommes
pas
en
désaccord
avec
le
Giec.
Nous
continuons
à
voir
ce
qui
pourrait
se
passer
après.
En
particulier
si
le
méthane
contenu
dans
la
toundra
ou
dans
la
calotte
glaciaire
se
libère.
Ce
qui
pourrait,
dans
un
scénario
catastrophe,
accroître
la
température.
On
ne
peut
parler
que
de
probabilité.
Cela
va
monter
de
plusieurs
degrés.
Mais
cela
pourrait
continuer.
Le
climat
a
été
profondément
perturbé
par
l'activité
humaine.
Il
s'agit
d'une
intrusion
très
rapide
qui
change
le
futur.
Quand
on
met
quelque
chose
en
marche
que
l'on
ne
prévoyait
pas,
cela
peut
avoir
des
effets
en
boucle
qui
peuvent
emballer
la
température
ou
la
faire
tomber.
Nous
sommes
dans
l'aventure.
Nous
sommes
des
apprentis
sorciers
et
nous
avons
déclenché
des
phénomènes
physique
dont
il
est
très
difficile
de
prévoir
l'avenir.
L'objectif
de
Kyoto
est-il
suffisant
pour
résoudre
ces
problèmes
?
Kyoto
est
un
tout
premier
pas.
Ce
protocole
propose
de
diminuer
de
5
%
les
émissions
de
gaz
carboniques.
Pour
arrêter
la
hausse
de
température,
il
faudrait
diminuer
de
60
%
ces
émissions!
Kyoto
n'est
qu'un
premier
pas
timide
et
étalé
dans
le
temps.
Comment
s'y
prendre
pour
atteindre
ces
60
%
de
réduction?
Aujourd'hui,
nous
émettons
huit
milliards
de
tonnes
de
carbone
dans
l'air.
L'océan
et
les
forêts
peuvent
en
absorber
deux
à
trois.
Cela
laisse
plus
de
la
moitié
libre
dans
l'air.
Il
faut
diminuer
de
façon
importante
les
émissions
:
cela
signifie
favoriser
les
voitures
avec
une
basse
consommation;
stimuler
les
transports
en
commun
et
tout
ce
qui
peut
amener
moins
d'émissions.
Le
nucléaire
est
présenté
par
ses
défenseurs
comme
une
solution
possible
pour
limiter
les
émissions.
Partisan
du
nucléaire
il
y
a
quarante
ans,
vous
êtes
aujourd'hui
un
farouche
opposant.
Pourquoi
?
J'étais
pour
au
début
parce
que
l'énergie
nucléaire,
c'est
un
million
de
fois
plus
d'énergie
par
unité
:
une
tonne
de
pétrole
équivaut
à
un
gramme
d'uranium.
Le
problème
des
déchets,
des
accidents
des
réacteurs,
de
dispersion
de
l'uranium
et
le
terrorisme
par
rapport
aux
réacteurs
n'étaient
pas
évidents
au
début.
Un
des
avions
du
11
septembre
était
destiné
à
s'abattre
sur
un
réacteur.
L'avion
a
raté
son
coup,
heureusement.
Cela
change
aussi
la
mise.
Mais
le
principal
ennemi
du
nucléaire,
c'est
son
extrême
impopularité.
Il
est
devenu
pratiquement
inacceptable
depuis
Tchernobyl.
Et
puis
nous
savons
que
les
réacteurs
actuels
ne
peuvent
utiliser
que
de
l'uranium
235.
Or,
cet
uranium
sera
épuisé
avant
la
fin
du
siècle.
Cet
argument
est
peu
évoqué
parmi
les
partisans
du
nucléaire...
Ils
s'en
gardent
bien.
On
ne
se
vante
pas
de
cela.
La
quantité
d'énergie
utilisée
sur
terre
est
équivalente
à
dix
mille
réacteurs.
Il
y
a
en
fait
6
%
qui
proviennent
du
nucléaire.
Supposons
qu'on
décide
que
50
%
de
cette
énergie
viennent
du
nucléaire:
cela
représente
5000
réacteurs.
Et
bien,
ces
quelque
5000
réacteurs
auront
épuisé
l'uranium
235
en
une
dizaine
d'années
!
C'est
ridiculement
petit.
Il
y
a
certes
l'uranium
238.
Mais
nous
ne
possédons
pas,
aujourd'hui,
de
réacteurs
capable
de
l'utiliser
commercialement
,
sauf
à
l'état
de
prototype.
Il
faudrait
donc
une
renaissance
de
ce
type
de
surgénérateur
qui
n'offre
pas
encore
les
garanties
de
sécurité
nécessaire.
On
pourrait
dès
lors
arriver
à
deux
ou
trois
mille
ans
puisqu'ils
peuvent
utiliser
aussi
le
thorium.
Trois
mille
ans,
mais
c'est
long
ça...
Deux
ou
trois
mille
ans,
c'est
le
temps
qui
s'est
écoulé
depuis
les
Egyptiens.
A
l'échelle
de
la
communauté
humaine,
qui
a
cent
mille
ans,
c'est
aussi
une
solution
à
courte
vue.
C'est
la
raison
pour
laquelle
je
suis
contre
le
nucléaire,
parce
que
l'on
est
toujours
à
courte
vue.
Il
faut
miser
sur
une
énergie
durable
à
très
long
terme.
C'est
à
dire
renouvelable.
Donc,
plutôt
le
soleil.
En
attendant,
quelle
politique
alternative
développer
?
Il
y
a
des
efforts
pour
développer
le
renouvelable,
mais
ils
sont
minimum
et
encrassés
dans
une
bureaucratie
invraisemblable.
C'est
pourtant
l'avenir:
une
participation
de
l'Etat
à
l'élargissement
des
objets
d'énergies
renouvelables
qui
permettra
de
baisser
les
prix.
C'est
ce
qui
s'est
passé
avec
la
voiture.
D'ailleurs,
les
prix
baissent,
mais
ils
ne
baisseront
pas
assez
vite
si
l'Etat
n'intervient
pas
massivement.
Des
gens
disent
que
le
renouvelable
ne
pourra
jamais
atteindre
la
limite
de
10.000
réacteurs:
personne
ne
connaît
l'avenir.
Il
y
a
des
progrès,
mais
si
on
ne
fait
rien,
cela
ne
se
produira
pas.
On
parle
de
l'hydrogène
comme
l'énergie
de
XXI
e
siècle...
Ce
n'est
pas
une
énergie
primaire.
L'hydrogène
ne
résout
pas
notre
problème
majeur
de
fournir
à
8
ou
10
milliards
de
personnes
l'équivalent
de
10.000
réacteurs.
Vous
appelez
à
une
sorte
de
plan
Manhattan
pour
faire
face
à
la
pauvreté.
C'était
aussi
l'ordre
du
jour
du
dernier
Sommet
de
la
terre,
qui
fut
un
échec...
C'est
bien
là
le
drame.
Or,
une
des
plus
grandes
menaces
qui
pèse
sur
la
vie
humaine,
c'est
l'inégalité
des
richesses.
Une
fraction
faible
de
l'humanité,
entre
10
et
20
%,
utilise
75
%
des
ressources.
Près
de
80
%
des
humains
sont
dans
une
misère
qui
est
une
cause
d'instabilité
sociale
majeure.
Aucune
solution
aux
autres
problèmes
ne
pourra
marcher
si
on
n'arrive
pas
à
contrer
la
tendance
présente
qui
est
à
l'augmentation
des
disparités.
Les
salaires
des
plus
riches
sont
de
plus
en
plus
importants
par
rapport
aux
salaires
des
plus
pauvres.
Dans
les
années
cinquante,
les
10
%
des
plus
riches
gagnaient
30
fois
plus
que
les
10
%
les
plus
pauvres.
Ce
chiffre
a
été
multiplié
par
cent.
C'est
la
tendance
inverse
à
celle
qui
serait
essentielle
pour
arriver
à
rétablir
la
distribution
des
richesses.
Comment
mieux
répartir
ces
richesses
?
Les
Etats-Unis
et
l'Europe
subventionnent
de
manière
très
importante
leur
agriculture.
Des
pays
très
pauvres
comme
le
Mali
ont
commencé
à
investir
dans
la
culture
du
coton.
Les
Etats-Unis
ayant
subventionné
de
façon
importante
leurs
cultures
de
coton
ont
fait
baissé
les
prix
en-dessous
de
ce
qui
peut
être
possible
pour
les
pays
pauvres.
C'est
l'exemple
type
de
ce
qui
ne
faut
pas
faire.
Autre
exemple
:
l'Europe
avait
demandé
une
diminution
des
pêcheries
dans
la
mer
du
Nord
et
dans
l'Atlantique.
Tous
les
pêcheurs
s'y
sont
opposés.
Mais
ils
doivent
comprendre
que
si
on
continue
à
pêcher
comme
ça,
l'épuisement
des
ressources
halieutiques
les
mettra
tous
au
chômage.
C'est
ce
qui
s'est
passé
au
Canada
autour
des
bancs
de
Terre-Neuve
où
cette
industrie
était
florissante
quand
j'étais
enfant.
On
s'est
aperçu
dans
les
années
septante
que
la
taille
des
morues
diminuait.
Et
on
a
pêché
plus
de
morues
jusqu'au
jour
où
on
a
constaté
qu'il
n'y
en
avait
plus...
Quelques
sceptiques
persistent
à
remettre
en
cause
ces
thèses
catastrophistes.
Que
leur
répondez-vous
?
Ils
doivent
aller
chercher
les
infos
aux
bonnes
sources!
Mon
choix
est
vite
fait
entre
ce
que
dit
Bjorg
Lomborg
et
les
2500
experts
intergouvernementaux!.
Les
améliorations
pertinentes
que
mentionne
Lomborg
n'intéressent
que
les
pays
riches.
C'est
vrai
que
la
qualité
de
l'air
s'est
améliorée
à
Londres,
Paris
ou
Bruxelles.
Mais
ce
n'est
pas
vrai
pour
Bangkok,
New
Delhi
ou
toutes
ces
villes
du
Tiers
Monde
où
la
pollution
s'accroît.
L'espérance
de
vie
augmente
dans
nos
pays,
mais
ce
n'est
pas
vrai
en
ex-Union
soviétique
ou
en
Afrique
subsaharienne.
Il
y
a
eu
des
améliorations
environnementales
dans
les
pays
riches,
certes.
Mais
on
ne
peut
pas
humainement
décrire
la
situation
selon
notre
point
de
vue.
Vous
reprenez
dans
votre
ouvrage
une
citation
d'Al
Gore,
candidat
déçu
aux
présidentielles
américaines,
qui
ne
pouvait
se
résoudre,
électoralement,
à
accepter
le
minimum
requis
par
les
scientifiques...
C'est
un
message
que
vous
envoyez
aux
politiques
?
C'est
un
message
que
nous
envoyons
à
nous
tous
puisqu'on
est
d'accord
pour
penser
que
la
démocratie
est
le
moins
mauvais
système.
Churchill
disait:
«C'est
le
plus
mauvais,
sauf
tous
les
autres!»
Mais
la
démocratie
a
un
défaut
fondamental,
c'est
qu'elle
n'habitue
pas
à
penser
à
long
terme.
Or,
les
problèmes
dans
lesquels
nous
sommes
sont
des
problèmes
à
long
terme.
Une
démocratie,
c'est
cinq
ans.
Nous
parlons
à
cinquante,
cent
ans
et
bien
plus...
La
façon
d'être
de
la
démocratie
vis-à-vis
d'un
problème
qui
risque
de
vous
faire
perdre
les
élections,
c'est
de
ne
pas
en
parler
!
Comment
changer
la
démocratie
en
profondeur?
Ca
c'est
une
autre
question.
Le
politique
demeure
donc
incontournable...
Tout
cela
doit
passer
par
la
politique.
C'est
très
ennuyeux,
mais
c'est
elle
qui
peut
prendre
des
décisions
importantes.
C'est
donc
par
appui
massif,
via
les
médias,
en
faisant
passer
le
message
que
nous
vivons
une
crise
très
grave
qu'il
faut
réagir.
C'est
le
but
de
notre
livre.
Tant
que
les
gens
n'ont
pas
réalisé
cela,
ils
vont
continuer
à
vivre
comme
avant
:
«business
as
usual.»
On
écoute
à
la
télé
et
on
s'apitoie.
Puis,
quand
vient
le
temps
de
prendre
une
décision,
la
jonction
ne
se
fait
pas.
En
France,
nous
avons
un
président
qui
a
fait
de
beaux
discours
sur
l'avenir
de
la
planète,
la
pauvreté,
l'environnement.
Cela
ne
suffit
pas.
Il
faut
que
cela
passe
dans
les
faits
par
des
actions
concrètes.
Et
la
Belgique,
je
crois
qu'elle
a
discours
assez
vert,
non
?
Moins
depuis
hier
!
Les
écologistes
ont
démissionné
du
gouvernement
(2).
Ah...
La
sensibilisation
ne
doit-elle
pas
passer
aussi
par
des
mesures...
impopulaires
?
L'augmentation
du
coût
de
l'énergie
sera
un
des
principaux
moteurs
du
changement.
Cela
va
se
passer
à
très
court
terme
avec
la
diminution
de
la
quantité
de
pétrole
disponible.
Aujourd'hui,
on
brûle
quatre
barils
pour
chaque
baril
puisé.
On
ne
peut
pas
continuer
comme
cela.
Les
experts
voient
une
très
forte
diminution
de
l'offre
dans
les
vingt
ans.
C'est
inéluctable.
Vous
abordez
l'alimentation
dans
votre
ouvrage.
Comment
nourrir
9
milliards
d'êtres
humains
en
2050
?
On
assiste
à
une
diminution
globale
de
la
quantité
de
nourriture
alors
que
la
population
continue
d'augmenter.
La
révolution
verte
a
été
bénéfique
mais
a
un
prix
que
l'on
va
payer
maintenant:
l'utilisation
massive
d'engrais,
de
pesticides
et
la
stérilisation
de
terres
posent
d'énormes
problèmes
environnementaux.
D'autre
part,
la
quantité
de
terres
arables
pour
les
moissons
et
les
pêcheries
sont
en
décroissance.
Les
biotechnologies
ne
seront
sans
doute
pas
la
panacée.
C'est
d'abord
un
problème
d'eau.
Une
grande
partie
de
l'Afrique
n'est
toujours
pas
irriguée...
Vous
évoquez
l'engagement
de
chacun
comme
source
possible
de
changement...
Vous-même
présidez
une
association,
pourquoi
?
Le
Rassemblement
des
opposants
à
la
chasse
(Roc)
avait
été
fondé
par
la
naturaliste
Théodore
Monod
en
1976.
Il
est
décédé
il
y
a
trois
ans
et
j'ai
accepté
de
prendre
sa
place
à
la
condition
de
changer
le
titre
de
l'association.
La
chasse
est
utile
dans
certains
cas
pour
réguler
les
populations.
La
chasse,
c'est
comme
les
pompiers
:
on
y
fait
appel
quand
il
n'y
a
pas
d'autres
solutions.
J'ai
accepté
si
le
mouvement
prenait
un
titre
positif.
C'est
devenu
la
Ligue
pour
la
protection
de
la
faune
sauvage.
Je
n'aime
pas
être
contre,
je
préfère
être
pour.
Nous
nous
occupons
des
pesticides,
des
produits
qui
sont
mis
dans
les
terres
et
qui
empoisonnent
les
animaux,...
Les
dates
de
chasse
nous
préoccupent
aussi.
En
France,
les
chasseurs
représentent
un
gros
parti
et
les
hommes
politiques
les
flattent
en
tolérant
des
choses
illégales.
Nous
sommes
régulièrement
au
Conseil
d'Etat
pour
faire
annuler
des
injonctions
du
ministère
de
l'Environnement.
Vous
abordez
la
question
de
la
sensibilisation,
moins
celle
de
l'éducation...
Peut-être
aurait-on
dû,
c'est
vrai.
C'est
l'éducation
des
enfants
qui
prime.
Les
enfants
ont
moins
de
préjugés.
Et
puis,
c'est
eux
que
cela
regarde
puisque
dans
cinquante
ans,
on
ne
sera
plus
là,
mais
ces
enfants
bien.
C'est
très
important
que
cela
soit
aussi
enseigné
dans
les
écoles
dès
la
maternelle.
Face
aux
constats
que
vous
faites,
l'univers
a-t-il
encore
uns
sens
?
C'est
la
question
que
cela
pose
!
Mon
idée,
c'est
que
les
humains
se
sont
trop
rapidement
décrétés
être
une
espèce
sacrée
vers
laquelle
tendait
toute
l'évolution.
L'évolution
de
la
vie
a
amené
l'apparition
de
dix
millions
d'espèces
dont
neuf
millions
ont
disparu.
L'espèce
humaine
se
qualifie
d'espèce
supérieure.
Mais
je
suis
toujours
méfiant
quand
on
est
juge
et
partie.
Qui
établit
des
critères
de
ce
qu'est
l'espèce
supérieure
sinon
ceux
qui
se
considèrent
comme
une
espèce
supérieure?
La
nature
ne
nous
fera
pas
de
cadeau
si
nous
n'arrivons
pas
à
vivre
en
harmonie
avec
elle.
Elle
nous
éliminera
au
bénéfice
d'autres
espèces.
Mais
cela
ne
remettra
pas
en
question
le
mouvement
de
croissance
de
la
complexité...
L'univers
apparaît
dans
un
état
très
chaotique,
très
désorganisé
et
au
cours
des
millénaires
on
voit
apparaître
des
structures
de
plus
en
plus
organisées,
des
atomes,
des
molécules,
d'une
part;
des
galaxies
et
des
étoiles,
d'autre
part.
Et
sur
la
terre,
les
petites
amides
avant
l'aspiration
d'espèces
plus
complexes,
performantes,
capables
de
faire
des
choses,
ce
qui
ne
veut
pas
dire
meilleures.
Cette
histoire
de
la
croissance
de
la
complexité
restera
vraie
que
l'humanité
soit
encore
là
ou
non.
C'est
simplement
un
changement
des
formes
de
vie
qui
apparaissent
sur
le
Terre.
Même
si
tous
les
animaux
macroscopiques
multicellulaires
disparaissent
et
que
l'on
se
retrouve
avec
des
organismes
monocellulaires,
on
peut
très
bien
imaginer
que
l'évolution
va
continuer
et
que
l'on
va
avoir
à
nouveau
des
espèces
nouvelles
:
la
vie
est
très
inventive.
Elle
est
toujours
en
train
de
bricoler
et
de
former
des
nouvelles
espèces.
Ce
qui
se
passe
pour
nous,
c'est
presque
anecdotique
par
rapport
à
l'univers.
Nous
sommes
une
espèce
capable
de
lancer
des
fusées
et
d'altérer
son
environnement,
d'écrire
des
pièces
de
Shakespeare
et
de
menacer
la
vie
par
nos
performances.
Si
notre
espèce
disparaît,
cela
n'empêchera
pas
la
vie
de
continuer.
Le
sens
est-il
là
?
Je
ne
sais
pas.
Cela
reste
une
question,
pour
moi,
le
sens.
C'est
la
question
religieuse
qui
existe
depuis
toujours.
On
n'a
pas
attendu
les
scientifiques
pour
se
la
poser.
Y
a
t-il
un
Dieu
?
Une
morale
?
Je
ne
pense
pas
que
tout
cela
soit
dû
au
hasard.
Mais
là,
je
suis
au
niveau
de
l'opinion,
au
sens
de
mon
intime
conviction.
Je
n'ai
donc
pas
à
la
prouver.
Je
pense
que
cela
a
un
sens,
mais
je
ne
sais
pas
lequel.
Ce
sens-là
n'est
pas
nécessairement
relié
à
l'apparition
de
l'espèce
humaine
en
ce
sens
qu'elle
pourrait
disparaître
sans
que
cela
ne
s'interrompe.
On
ne
reviendra
pas
au
bing
bang,
mais
peut-être
à
ce
qu'était
la
planète
il
y
a
un
milliard
d'années.
La
vie
continue...
Existe-t-elle
ailleurs,
cette
vie
?
Il
faut
un
certain
nombre
de
conditions
:
une
température
entre
0
et
100
º,
de
l'eau
liquide,
un
bouclier
contre
le
rayonnement
cosmique.
On
connaît
les
conditions
sans
lesquelles
aucune
vie
n'est
possible.
Prenons
une
planète
qui
aurait
ces
conditions,
comme
par
exemple
la
Terre,
il
y
a
quatre
milliard
d'années.
Est-ce
que
la
vie
y
apparaît
de
manière
plus
ou
moins
automatique
ou
la
probabilité
de
la
vie
est
faible?
Je
répondrai
que
nous
avons
à
notre
disposition
une
centaine
d'étoiles
qui
ont
des
systèmes
planétaires.
On
ne
peut
aujourd'hui
observer
que
des
grosses
planètes.
Une
planète
comme
la
nôtre
ne
serait
pas
détectable
avec
la
technologie
contemporaine.
D'ici
une
vingtaine
d'années,
nous
pourront
savoir
si
les
autres
systèmes
planétaires
ont
également
des
petites
planètes
de
type
terrestre,
des
socles
rocheux
sur
lesquels
la
vie
pourrait
se
développer.
Notre
planète
a
une
atmosphère
d'oxygène
parce
que
c'est
la
vie
elle-même
qui
a
transformé
le
gaz
initial
en
une
atmosphère
d'oxygène.
Si
on
trouve
de
l'oxygène
ailleurs
par
absorption
du
spectre,
ce
serait
donc
un
beau
candidat
pour
penser
qu'il
y
a
de
la
vie.
Propos
recueillis
à
Paris
par
CHRISTOPHE
SCHOUNE
(1)
«Mal
de
Terre»,
Hubert
Reeves,
avec
Frédéric
Lenoir,
Editions
du
Seuil
-
Année
2003.
(2)
Cet
entretien
s'est
déroulé
le
6
mai2003.
Source
:
Le
Soir
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